Atelier 2015 : Grand et petit
Sous la direction de Darmon Nadine
Texte de Botho Strauss
Il existe une légende talmudique selon laquelle, chaque génération compte trente-six Justes qui bien qu’ils soient inconnus ou cachés, permettent au monde de subsister. André Schwarz-Bart avait puisé dans cette légende le sujet de son ouvrage Le dernier des Justes et il avait écrit à ce propos : « Je n’ai pas cherché (mon) héros parmi les révoltés du ghetto de Varsovie, ni parmi les résistants qui furent, eux aussi, la terrible exception. Je l’ai préféré désarmé de cœur, se gardant naïf devant le mal, et tel que furent nos lointains ascendants. Ce type de héros n’est pas spectaculaire. On le conteste volontiers aujourd’hui au nom d’une humanité plus martiale. ».
À la fin des années 70, Botho Strauss offre une Juste, en la personne de Lotte l’héroïne de la pièce, à une Allemagne en quête de sens. Pourtant Lotte n’est pas confrontée à la barbarie mais à la médiocrité de destins mis à l’épreuve d’un quotidien étouffé par le matérialisme.
Aujourd’hui, à la lumière de ce texte, je voudrais imaginer comment accueillir le regard d’un Juste dans notre intimité, nous, qui sommes en permanence confrontés aux images de la barbarie et aux nécessités économiques.
Si les murs n’existaient pas, certaines personnes frapperaient pourtant à la porte avant d’entrer…Lotte est de ceux-là, elle tente l’expérience du respect et de la courtoisie comme arme de défense contre les multiples déceptions de la normalité et de la solitude.